Le droit pénal des affaires à l’épreuve des réformes récentes

Le droit pénal des affaires connaît depuis quelques années d’importantes évolutions, tant sur le plan législatif que jurisprudentiel. En effet, face aux nombreux scandales financiers et aux enjeux de lutte contre la criminalité économique, les pouvoirs publics ont pris des mesures pour renforcer l’arsenal juridique et procédural en la matière. Cet article vise à présenter un aperçu des principales réformes récentes ayant impacté le droit pénal des affaires.

La loi Sapin II : un tournant majeur dans la lutte contre la corruption

Adoptée en 2016, la loi Sapin II constitue sans conteste une avancée majeure dans la prévention et la répression de la corruption en France. Parmi ses principales dispositions figurent notamment :

  • la création de l’Autorité française anticorruption (AFA), chargée d’assurer la coordination et le suivi des politiques de prévention et de détection de la corruption ;
  • l’obligation pour les entreprises d’adopter un programme de conformité anticorruption, comprenant notamment un code de conduite, un dispositif d’évaluation des risques, des procédures de contrôle interne et un mécanisme d’alerte interne ;
  • la possibilité pour les personnes morales de conclure une convention judiciaire d’intérêt public (CJIP), permettant de régler certaines infractions pénales par le paiement d’une amende, sans reconnaissance de culpabilité ni inscription au casier judiciaire.

Ces mesures ont conduit à une véritable mutation des pratiques en matière de lutte contre la corruption, tant pour les entreprises que pour les autorités répressives.

Le renforcement des sanctions en matière de fraude fiscale

La fraude fiscale est également au cœur des préoccupations du législateur et du juge pénal. Plusieurs réformes sont venues renforcer les sanctions applicables en la matière :

  • la loi du 23 octobre 2018, qui a notamment instauré un nouveau délit de fraude fiscale aggravée, puni d’une peine de sept ans d’emprisonnement et d’une amende de deux millions d’euros ;
  • la loi du 24 octobre 2018, qui a mis en place un nouveau mécanisme de sanction fiscale pénale, permettant aux services fiscaux de saisir directement le juge pénal en cas de soupçon de fraude ;
  • la création, en janvier 2019, du Parquet national financier (PNF), compétent pour enquêter et poursuivre les infractions complexes et transnationales en matière économique et financière.

Ces dispositions témoignent d’un durcissement de la répression à l’égard des fraudeurs fiscaux, avec pour objectif de lutter plus efficacement contre ce fléau.

La loi sur le secret des affaires : un nouvel équilibre entre protection et transparence

En 2018, une loi a été adoptée pour transposer en droit français la directive européenne sur le secret des affaires. Cette loi vise à protéger les entreprises contre l’appropriation illicite de leurs informations économiques, technologiques ou commerciales confidentielles. Elle instaure notamment :

  • une définition précise du secret des affaires, fondée sur le caractère non public, la valeur économique et les mesures de protection mises en place par l’entreprise ;
  • la création d’un régime spécifique de responsabilité civile, permettant aux entreprises victimes d’obtenir réparation en cas d’atteinte au secret des affaires ;
  • des mesures spécifiques de protection en cours de procédure judiciaire, telles que la possibilité de restreindre l’accès aux pièces confidentielles ou de prononcer des mesures conservatoires.

Toutefois, cette loi a également suscité des inquiétudes quant à son impact sur la liberté d’expression et le droit à l’information. C’est pourquoi elle prévoit certaines garanties, telles que le maintien du principe du contradictoire et la protection des lanceurs d’alerte.

Au regard de ces différentes réformes, il apparaît que le droit pénal des affaires évolue constamment pour s’adapter aux enjeux économiques et sociaux de notre époque. Les entreprises et les professionnels du droit se doivent donc de se tenir informés des nouveautés législatives et jurisprudentielles afin d’anticiper les risques et d’assurer une conformité optimale à la réglementation en vigueur.